Mon ami Jan Thirion n'est plus

Nous nous sommes rencontrés sur le forum de Polarnoir, tenu par Patrick Galmel, il y a plus de dix ans déjà. Jan avait publié un ou deux romans, mal édités. Il a adhéré tout de suite à Krakoen que je venais de créer. Et nous avons réédité sous un nouveau titre - Mikko - un ouvrage paru au Manuscrit. Dans le même temps, Jean-Benoit est devenu Jan sur ma suggestion. Puis se sont enchainés les titres : Ego Fatum, Rose blême (mon préféré), John et Yoko, Nuoc Mam baby, Sex toy, etc.

La blogosphère a bien accueilli ses romans, reconnaissant chez Thirion une voix singulière du noir. Claude Mesplède ne s'y est pas trompé non plus en lui consacrant un article dans son Dictionnaire des littératures policières en deux tomes. Gérard Collard, de la Griffe noire, l'avait repéré avec John et Yoko, dans une émission de télé (intervention bâclée) donc sans suite.

Jan était également un styliste, un grand artiste de la forme courte : de la nouvelle jusqu'à la phrase unique à la Fénéon.

Tout nos contacts s'effectuaient par mail et téléphone, je n'ai rencontré Jan que bien des années plus tard, lors du festival Polar du sud à Toulouse en 2009. Très réticent au départ, il avait accepté sur mon insistance de participer à des manifestations littéraires autour de Toulouse étant considéré que sa mobilité était réduite. Une amitié profonde s'est nouée. J'en ai reçu bien des témoignages de lui en recevant des CD de blues notamment car il savait que j'aimais cette musique

C'est naturellement qu'il m'a suivi quand j'ai lancé SKA en compagnie de Jeanne Desaubry. Il nous a donné des nouvelles noires et érotiques d'une grande originalité. D'ailleurs ce mois-ci nous publions La grande déculottée, un texte complètement frappadingue et jubilatoire dont l'action se déroule sur le front de la Grande guerre. VOIR ses ebooks SKA

De grand culture notamment livresque, il avait accepté d'être directeur des collections Perle noire (classiques du roman policier) et Perle rose (classiques du domaine érotique).

De même, les éditions du Horsain créées par l'Association des amis de Krakoen a publié quelques uns de ses textes. VOIR le catalogue

Il commençait tout juste à venir sur le devant de la scène littéraire avec un polar édité par Jean-Charles Lajouanie : 20 manières de se débarrasser des limaces.

Jan était très productif VOIR sa bibliographie.

Pour moi, Jan Thirion était est un grand écrivain du noir méconnu, comme tant d'autres, qui n'ont pas accès aux maisons d'édition ayant les moyens conséquents de promotion et de diffusion.

Deux témoignages :

“Il suffit de lire ses textes. Sous la patience de l’écrivain, du vrai, celui qui prend le temps du conte, coule l’impatience du style. Et pas de n’importe lequel, le plus complexe, dérangeant et éclairant à la fois… celui qui trouble, qui cisaille, qui parle d’âme et de tripe et qui évoque un intangible absolu.“ Jean-Bernard Pouy

“Jan Thirion possède l’art de voir des tas de choses ; l’art de saisir des anecdotes d’une redoutable efficacité ; l’art de raconter tout cela d’une plume alerte dans un style toujours délicieusement imagé où se mêlent réalisme et fantastique, poésie et humour noir.” Claude Mesplède

Mes pensées vont à sa femme Cathy et à son fils, ainsi qu'à tous ses proches. Il avait 64 ans. Les obsèques de Jan Thirion se sont déroulées samedi 5 mars à 14 h 30 au cimetière Pahin de Tournefeuille.

Repose en paix, Jan !

Max, ton ami.

Au premier plan, Jan Thirion (à gauche) T.P.S. 2009 (Photo Boris Lamot)